16 avril 2010

Beautés froissées




L'artiste Rupert Shrive renouvelle l'art du portrait dans ces beautés froissées, transforme la peinture en sculpture.
Des traits fardés et troublants de ses visages au bord de la disparition émane un parfum évanescent et prégnant à la fois qui me rappelle celui des ukiyo-e, des belles courtisanes des images du monde flottant japonais de l'époque d'Édo.

Kakemono de Kaigetsudo Ando,
encre et couleurs sur soie, XVIIe siècle,
conservé au Japon.


Ils ont aussi à voir, avec la vive émotion née de la nostalgie du regard des portraits du Fayoum.


Portrait de femme, 24 X 42 cm,
bois de tilleul peint à l'encaustique et doré, milieu du IIe siècle après J.-C., Fayoum ?, conservé au Musée du Louvre.


«J’essaie de capturer des moments éphémères, des présences fugitives, comme les visages que vous voyez trembler à la lumière d’un feu. Donc l’impermanence des choses est certainement là […]. Cela me fascine et est très difficile à saisir dans une peinture », confie l’artiste anglais au critique d’art Michael Peppiatt, biographe de Francis Bacon.



Les oeuvres de Rupert Shrive ont cela de merveilleux qu'elles me procurent un double plaisir : celui de leur beauté intrinsèque, auquel s'ajoute l'évocation d'autres univers créatifs qui m'émeuvent particulièrement, comme cette "Chinese girl" qui m'emporte instantanément dans l'ambiance nocturne et mélancolique du film de Wong Kar Wai, "In the mood for love".



Rupert Shrive vit et travaille à Londres et Paris.
Né en 1965, il a grandi à Norfolk et suivi ses études à l’école d’art de Norwich puis à celle de St Martin à Londres.

14 avril 2010

Poésie de la pluie




J'aime le caractère YU, la pluie.
Il est resté très semblable au pictogramme originel.
Le caractère montre quatre gouttes qui tombent des nuages représentés dans le récipient ouvert vers le bas et suspendu dans le ciel (le trait horizontal supérieur).

En mettant après la clé celle de vêtement, on a un imperméable : le vêtement pour se protéger de la pluie...
yu yi imperméable



En écrivant sous le caractère de pluie celui de champ, on a le tonnerre.
lei tonnerre



En écrivant après tonnerre le caractère de pluie, on a l'orage.
lei yu orage


Avec le caractère de grenouille après la clé, on a la rainette, le petit animal amphibie vert tendre dont le coassement annonce la pluie.

yu wa rainette








Pluie fine en mars
Lavis (34 x 26 cm) de CHIANG Tsu-Wang,
Peintre et calligraphe taiwanais.


Ajami



Ajami, est le nom d'un quartier de Jaffa ville rattachée à l'agglomération de Tel Aviv, en Israël. Là se nouent des drames, s'imbriquent les destinées de personnages si différents et si proches, la violence est crue, réelle.

Quand la lumière s'est rallumée dans la salle de cinéma, pendant de longues secondes, aucun mouvement alentours.

Comme l'écrit très bien Jacques Mandelbaum dans Le Monde,
c'est "un film électrique, nerveux, inventif, palpitant comme la vie et tranchant comme la mort". Ce "monde pourri de l'intérieur par les logiques claniques, vitrifié par le repli communautaire", est montré avec une efficacité redoutable !

Yaron Shani, isralélien d'origine juive et Scandar Copti, israélien d'origine palestinienne ont écrit et réalisé ce film terriblement noir, terriblement éclairant aussi. Si l'oxymore a une terre d'élection, c'est Ajami.